Reconnaissance & Adoption
Ayant plus ou moins explicitement (ou implicitement selon le point de vue) pris la décision pour moi-même, lors de la création de ce blog, d’essayer de maintenir une entrée chaque quatre à cinq jours, j’ai ressenti un léger choc lorsque je me suis aperçu que je n’avais plus donné signe de vie – si l’on ne compte pas les quotes of the month – depuis presque quatre mois… étant habitué à prendre du retard, je ne m’en étais pas préoccupé plus que tant, mais jamais je n’aurais pensé que le temps avait filé si vite: tempus fugit velociter.
Je n’ai cependant aucun remord… ce blog n’a pas été créé dans le but de susciter la discussion sur des sujets de fonds, ni de maintenir une discussion vivante ou ultimement de changer le monde (ce qui, même si j’en avais eu le désir, serait fort présomptueux, si l’on jette un coup d’oeil aux commentaires ou statistiques de mon site). Je n’ai écrit ces bafouilles que dans l’unique but de me faire plaisir et, si la situation se présentait, de pouvoir partager ces moments avec qui serait intéressé. Mais, cette situation m’a donné quelque peu à penser à propos de mon processus d’écriture et d’organisation ; et les mettre par écrit me permettra peut-être de les exorciser.
L’origine des problèmes d’organisation temporelle, en tout cas en ce qui me concerne actuellement, est la fatigue. Cette fatigue que l’on porte accroché à son pied comme le forçat son boulet… plus on avance, plus on en accumule et moins en s’en sort. La masse informe de travail (cours, thèse, livre, article et recensions) me poursuit sans trêve aucune (c’est tout le problème d’un travail intellectuel qui se moque du temps et vous assaille même pendant les vacances); les multiples déplacements à travers la Suisse pour organiser mon prochain mariage… les tentatives pour garder un semblant de vie sociale et maintenir contact avec les amis… tout le tralala administratif… et plus encore. Cette fatigue est porteuse de délai et de procrastination. On n’arrive plus à maintenir le rythme effrayant de la vie courante, et l’on est obligé de remettre tout ou partie du travail. C’est là que le premier effet pervers se produit: le retard. On ne peut remettre à plus tard sans fin, et si l’on arrive pas immédiatement à relever la situation en supprimant la fatigue, on s’enserre dans la spirale du retard.
Le retard s’accumule de la même manière que la fatigue, l’un entraînant l’autre nécessairement: la force mis en place pour tenter de reprendre le retard et terminer les travaux ne fait souvent qu’augmenter la fatigue, et donc par la même occasion le retard. Afin de ne pas être complètement dépassé, souvent la seule solution qui se présente – surtout si l’on n’est pas libre de prendre des vacances selon son bon plaisir – est d’établir une liste des priorités et d’abandonner partie de nos activités. Malheureusement le plus souvent les activités les plus facilement sacrifiables sont empruntées aux loisirs (si l’on a une conscience professionnelle, on ne peut sacrifier son travail, pour lequel on est payé); or, en supprimant les loisirs, on supprime de fait la source principale de coupe fatigue et de plaisir… le résultat devient encore plus pénible: si l’on arrive à résoudre le problème du retard par un gain de temps, non seulement la fatigue n’est pas supprimée, mais de plus la grogne et la tristesse s’installent. On devient donc moins efficace, et tout le processus recommence, mais en pire, dont l’aboutissement est souvent une dépression.
Alors que faire ? deux chemin, complémentaires et exigeants, se présentent: la reconnaissance des difficultés et l’adoption d’un autre style de vie. En effet, il est urgent, lorsque la spirale de la fatigue s’annonce, de pouvoir reconnaître ses signes avant-coureurs, et de pouvoir le plus rapidement possible les supprimer en adoptant une nouvelle hygiène de vie: suivant la latitude possible dans son travail, il faudrait baisser la vitesse et mieux organiser ou répartir son travail, et si cela n’est pas possible, prévoir impérativement un week-end prolongé par la suite, avant l’arrivée de tout autre travail, pour récupérer. Changer parfois son horaire pour en adopter un meilleur permet aussi de mieux mettre en place une activité sportive par exemple, afin de compenser la fatigue intellectuelle en se levant plus tôt le matin et en se couchant plus tôt (il est connu que les activités sportives matinales sont plus efficaces). Ce ne sont que des exemples d’une réalité fort complexe, et ils sont donc, j’en suis bien conscient, limités. Bien sûr, dans l’idéal, il faudrait aussi changer ces conceptions de fond de notre société occidentale d’aujourd’hui, qui privilégient, non pas l’épanouissement de tout être humain, mais la jouissance économique et la productivité. Le combat est tout juste commencé, et doit être mené à son terme pour notre survie: il faut impérativement remettre l’humain au centre du travail… l’homme doit pouvoir travailler pour pouvoir accomplir toutes ses potentialités et se réaliser pleinement, mais il n’a pas été créé pour fournir du carburant au travail, qui existerait comme une réalité indépendante dominatrice qu’il devrait servir.
Comme je l’ai dit, ce blog n’a pas pour but de changer le monde… seulement de traiter de ces petites choses qui peuvent contribuer à me rendre meilleur, donc plus humain… et s’il peut en aider aussi d’autre, tant mieux.
Vale !